1000 milles entre la France, l’Angleterre et l’Irlande : la CIC Normandy Channel Race offre aux navigateurs de Class 40 un parcours varié et exigeant. Cette année, vingt-quatre monocoques, dont Captain Alternance, le Class40 de l’association Walt, dont La Construction est partenaire, s’affrontent dans une course qui a tout d’un sprint pendant 5 jours.
Entre Bretons et Normands, la concurrence est rude. Le nautisme n’échappe pas aux disputes amicales entre les deux territoires. Face à une Bretagne qui prenait le large dans l’organisation de grandes épreuves de voile, la Normandie a décidé en 2010 de créer la CIC Normandy Channel Race. Quatorze ans plus tard, le succès est au rendez-vous.
Pour attirer des navigateurs friands des eaux de l’Atlantique, les organisateurs ont conçu un parcours qui associe course le long des côtes et course au large. Depuis la baie de Ouistreham, les skippers longent les plages du Débarquement puis suivent une perpendiculaire direction l’île de Wight. Après avoir longé les falaises des côtes sud de l’Angleterre, les marins traversent la mer Celtique pour rejoindre Tuskar Rock et Fastnet Rock en Irlande. Enfin, dernière ligne droite vers Guernesey pour une arrivée dans les eaux de départ.
La CIC Normandy Channel Race exige une vigilance de tous les instants, notamment dans la Manche où le trafic maritime est très dense. Les marées, les courants et les cailloux à proximité des îles anglo-normandes peuvent se révéler décisifs dans la course vers la victoire. Technique, tactique, intense, la course normande est devenue un incontournable du circuit des Class40.
La CIC Normandy Channel Race exige une vigilance de tous les instants, notamment dans la Manche où le trafic maritime est très dense. Les marées, les courants et les cailloux à proximité des îles anglo-normandes peuvent se révéler décisifs dans la course vers la victoire. Technique, tactique, intense, la course normande est devenue un incontournable du circuit des Class40.
Crédit : CIC Normandy Channel Race
Dernière course de Captain Alternance… pour cette saison !
Dimanche 15 septembre, Captain Alternance a pris le départ de la CIC Normandy Channel Race. Après avoir traversé l’Atlantique, le Class 40 s’aventure cette fois dans les eaux froides de la Manche et de la mer Celtique. À la barre, Kéni Pipérol et Raphaël Lutard qui l’accompagne au pied levé, visent le haut du classement.
À l’avant-veille du départ de la CIC Normandy Channel Race, les vingt-quatre monocoques alignés le long du quai Vendeuvre à Caen ressemblent à des montures prêtes à surgir de leurs stalles. Pour obtenir quelques informations sur la composition de ce tableau à ciel ouvert, les visiteurs peuvent s’appuyer sur les fiches que les organisateurs ont installées devant chaque monocoque. Curieusement, le numéro 190 est dépourvu de « cartel ». Et pour cause. L’équipage de Captain Alternance vient d’être modifié.
Faire face aux aléas
Au bout du ponton, un marin s’avance clopin-clopant, le genou harnaché dans une attelle. Thomas Jourdren, qui a effectué toutes les courses en équipage de la saison avec Kéni, s’est blessé lors du convoyage de Captain Alternance entre le Médoc et la Normandie. Après examen par l’équipe médicale, le navigateur n’a pas été autorisé à prendre part à la Normandy Channel Race. Déçu mais philosophe, Thomas estime que c’est le métier qui rentre.
Comme toute écurie, Neo Sailing Technologies dispose d’une équipe de navigateurs capables de prendre la relève en cas d’imprévus. Raphaël Lutard, qui a convoyé le bateau, prend donc la suite de Thomas aux côtés de Kéni. Le jeune homme connaît Captain Alternance sous toutes les coutures puisqu’il en est le préparateur technique. Le large ne lui est pas non plus inconnu après une traversée en solitaire de l’Atlantique à bord d’un Mini 6.50. Ce changement de dernière minute n’inquiète pas Kéni outre mesure, « les pépins physiques font partie du jeu. Sur terre comme en mer, un navigateur doit s’adapter à toutes les circonstances ».
Chaque chose en son temps
Pour sa deuxième participation à la Normandy Channel Race, Kéni se montre plus confiant. « En 2023, nous avions pris le départ avec un bateau abîmé, la course s’était déroulée dans des conditions météorologiques dantesques. Nous étions revenus rincés et frustrés ». Après deux top 10 sur la Niji40 et la Québec – Saint-Malo, le skipper aborde la course avec une détermination intacte. « J’ai envie de terminer le circuit Class40 avec ce Captain Alternance sur une belle performance ».
Si sa saison sportive lui a apporté plusieurs motifs de satisfaction, Kéni évoque un autre moment comme source d’émotion forte : « J’ai eu la chance de participer au Relais des Océans et d’acheminer la flamme olympique entre la Martinique et la Guadeloupe. Ce fut un honneur et une grande fierté d’être choisi comme l’un des porteurs de cette flamme et de participer, à mon échelle, à cet événement. »
Crédit photos : Walt, Jean-Marie Liot / CIC NCR 2024
Des apprentis du bâtiment à bord de Captain Alternance
Quelques jours avant le départ de la course, une trentaine d’apprentis en peinture et en électricité du CFA du bâtiment de Caen ont pu découvrir l’univers de la course au large. Face à ce jeune public, Kéni s’est improvisé guide-conférencier. Avec la même aisance qu’à la barre de son Class40.
Vendredi 13 septembre, sur le ponton face à Captain Alternance, dix-sept apprentis en CAP Électricité se sont regroupés et écoutent les dernières consignes de leurs accompagnants. Le port est à une dizaine de minutes de leur CFA mais « il faut franchir le périphérique » explique l’un d’entre eux comme une évidence. C’est donc dans un minibus, encadré par « Monsieur Hervieux, le prof de sport » qu’ils ont rejoint les bords de l’Orne et le quai où les attend Kéni.
Le prix de la passion
Le monde nautique leur est pour la plupart étranger. Un seul évoque à demi-voix les bateaux à moteur de la douane de Cherbourg « qui peuvent aller jusqu’à 100 km/h ». Kéni doit le décevoir : Captain n’atteint « que » les 27 nœuds (60 km/h). Le skipper se rattrape en évoquant les 19 mètres du mât et la quille de 3 mètres. Monsieur Hervieux se charge de questionner Kéni sur sa vie à bord, sa préparation physique, sa gestion des blessures, son rythme de sommeil en course, sa vie sociale. Le jeune skipper reconnaît qu’il a « peu de temps à consacrer à ses potes. C’est le prix de la passion ».
Un bateau à voiles… non dépourvu d’électricité
Face à ces futurs électriciens, Kéni présente opportunément l’installation électrique à bord de Captain. « 8 batteries de 60 ampères chacune, couplées à des panneaux solaires, alimentent le moteur, les écrans de navigation et le pilote automatique. En cas de panne, un système de spare prend le relais », détaille-t-il.
L’un des adolescents l’interroge sur le trafic maritime dans la Manche et s’étonne que les monocoques n’aient pas la priorité. « Normalement, tous les bateaux professionnels doivent être équipés d’un système AIS (Automatic Identification System) qui permet de connaître le positionnement de toute la flotte, lui explique Kéni. Mais certains bateaux en sont encore dépourvus, on doit donc être très vigilants ».
« Et tu gagnes quoi ? ». La question, surgie à la fin de l’échange, fait sourire Kéni. « Pour cette course, il y a un price money. Mais il n’est pas très élevé. Globalement, on ne fait pas ce métier pour l’argent ! Mais on gagne de la satisfaction personnelle et de la visibilité pour les partenaires qui nous soutiennent. »